A vingt ans, pour moi la
réincarnation ce n'était rien de plus qu'un folklore indien ou
tibétain. Je n'avais aucune conviction religieuse et j'étais même
plutôt athée. Ce n'est pas que je ne me posais pas de questions
bien sûr. Comme tout le monde je m'interrogeais sur le sens de la
vie. On se demande tous un peu pourquoi on est là, non ? Et
comme tout le monde, ou presque, je n'avais pas de réponse. Or
j'étais à l'université à l'époque, et je n'avais ni le temps ni
le courage de courir après ces réponses. La société nous pressait
de trouver un boulot, de fonder une famille, et de faire comme tous
les autres. On y arrive plus ou moins, et pour moi c'était plutôt
moins que plus. Combien de fois je me suis demandé ce que je foutais
sur cette Terre ?
Le changement a commencé
quand j'ai eu entre les mains un livre de Patrick Drouot qui parlait
de réincarnation. Je ne sais pas pourquoi j'ai lu ça, ce n'était
pas mon type de lecture. C'est sans doute parce que ma mère me
l'avait prêté (on ne dit pas non à sa mère, n'est-ce-pas ?).
Habituellement je lisais plutôt du fantastique ou de la
science-fiction. Vue sous cet angle, cette histoire de réincarnation
était plutôt sympa. Mais voilà, je me suis laissé prendre au jeu.
Car Patrick Drouot avait une manière quasi scientifique d'expliquer
les choses, et ça me parlait. Il expérimentait et envisageait les
diverses possibilités sans imposer quoi que ce soit. J'aimais ça.
Je n'ai jamais été enclin à croire ce qu'on nous impose sans
explication, et c'est sûrement pour ça que je n'ai jamais adhéré
à la religion. Là, le type exposait les faits tout simplement, et
il y avait une explication théorique qui tenait sérieusement la
route. A la fin de ce bouquin, j'étais « sur le cul »,
comme on dit. Je tenais enfin une théorie spiritualiste qui
ressemblait à quelque chose de cohérent. C'était bien beau, mais
je n'étais pas encore tout à fait convaincu. Parce que si je
m'arrêtais là, ça ne serait rien de plus qu'une croyance comme une
autre. Par chance, dans son livre Drouot exposait sa méthode pour
faire régresser ses patients dans leurs vies antérieures, comme il
disait. Et j'avais l'impression qu'il pouvait être possible de
pratiquer sur soi-même cette « régression », sorte de
technique de méditation ou d'auto-hypnose. Mais je me foutais bien
du nom, ce qui m'intéressait c'était le résultat.
A l'époque je logeais
seul dans un petit appartement, et j'avais commencé à travailler
avec des horaires de bureau tranquilles. Je crois que ce livre
m'était tombé entre les mains au bon moment. Les conditions étaient
réunies pour que je réussisse mon expérience. Il fallait avoir un
petit coin tranquille, un cocon à soi, et du temps à disposition.
J'avais tout ça.
Une chose importante avant
de se lancer dans une régression, c'est qu'il faut choisir un
élément de concentration, quelque chose qui peut avoir un lien avec
une vie antérieure. Ca peut être un être cher (votre mamie adorée,
un ami qui est comme un frère), une passion inexplicable (Vous
adorez les chapeaux de cow-boy depuis tout petit ? Vous rêvez
de visiter le Zimbabwe depuis toujours? ), un trait physique ou moral
particulier (Vous avez peur de l'eau sans savoir pourquoi ? Vous
avez une tâche de naissance en forme de cloche?), etc. Je reviendrai
plus tard sur ces liens entre passé et présent. En tout cas, le
choix de cet élément est important. Il va permettre au moteur de
recherche de votre conscience de se focaliser sur une donnée sans se
perdre dans un magma d'informations. Par commodité, j'appelle cet
élément le focus. Sans ce focus, la tentative de régression risque
de ramener un mélange d'images chaotique. J'avais des éléments de
ma vie que je brûlais d'envie de prendre tout de suite comme focus,
des choses très importantes pour moi. Mais j'avais peur de fausser
tout le processus si je prenais d'emblée un truc trop fort
émotionnellement. Je pourrais les tester plus tard si le premier
essai était concluant. Je préférais choisir quelque chose de
moindre importance pour un début. Or depuis longtemps j'avais une
passion pour les loups. J'ignorais pourquoi, mais cet animal me
fascinait plus que tout autre. Je m'en sentais proche. Cette passion
serait mon focus pour ma première tentative de voyage dans le passé,
c'était décidé.
Prêt pour l'expérience,
allongé sur mon lit et volets à demi-fermés (la pénombre aide à
se détacher du présent), je commençai le travail de méditation.
Je ne vais pas détailler maintenant tout le processus de régression,
j'y reviendrai plus tard. D'après P. Drouot, il y avait peu de
chances que le premier essai donne un résultat spectaculaire.
L'exercice devait devenir plus facile avec la pratique. Je ne
m'attendais donc pas à quelque chose d'extraordinaire du premier
coup. Lorsque la phase de méditation arrivait à son point crucial,
il fallait traverser mentalement le « tunnel du temps »,
passage spirituel qui devait m'amener dans le passé. Je gardais à
l'esprit mon focus, l'image d'un loup, et je m'engouffrai dans le
tunnel à toute vitesse.
A la sortie du tunnel,
tout devint calme autour de moi. Au tout début je ne vis rien. Les
sensations arrivaient petit à petit, comme si toute une scène se
construisait brique après brique. Je vis d'abord mes mains, burinées
et couvertes de poils blonds, puis mon corps, que je ressentis grand
et costaud. J'avais de longs cheveux en bataille et une barbe blonde,
et je portais des vêtements de cuir, et une carabine. Autour de moi
des arbres apparurent, c'était une grande forêt sous la chaleur de
l'été. A côté de moi j'aperçus une forme se déplacer, comme un
chien. Mais non, ce n'était pas un chien ! C'était un loup
bien sûr, ou plutôt une louve. C'était une femelle, l'information
me vint à l'esprit comme ça, tout naturellement. Je m'agenouillai
et me mit à caresser le pelage gris de l'animal. Elle était
apprivoisée et se laissa faire. J'étais son maître.
La scène changea d'un
coup pour faire apparaître l'endroit où j'habitais. C'était une
maison de bois toute simple, une sorte de cabane de chasse en haut
d'une colline boisée. Je savais qu'une rivière coulait à peu de
distance, et qu'un bourg se trouvait plus loin, à quelques heures ou
jours de marche. J'étais au Canada, j'en étais sûr, et plus
particulièrement au Québec, à l'embouchure du St Laurent. Un nom
se fit entendre dans ma tête, mais je le percevais mal, comme si
quelqu'un le prononçait avec une patate chaude dans la bouche. Ca se
terminait par quelque chose comme « -amis ». Ce qui était
sûr, c'est que j'étais un trappeur. Je chassais les animaux pour
revendre leurs peaux en ville. Et dans ce boulot j'avais à mes côtés
ma louve et ma fidèle carabine Winchester 30/30.
Le temps avança encore
d'un coup. Je me retrouvai dans la même forêt mais couverte de
neige cette fois, dans le froid de l'hiver canadien. Je marchai dans
l'épaisse couche blanche, couvert de cuir et de fourrures, suivi de
ma louve. Tout à coup quelque chose attira mon regard : une
main humaine sortait de la neige. Je m'approchai, je creusai autour
et je finis par dégager le corps d'un homme brun et barbu. Il
respirait encore, vivant mais inconscient. Il fallait que je le
transporte pour le faire soigner. Dans cet environnement hostile, ce
n'était pas une mince affaire ! Je le portais comme je pouvais,
mais je me mettais en danger moi-même en voulant l'aider. Pourtant
je ne pouvais pas le laisser là. Et crac ! Ce qui devait
arriver arriva. Brusquement la neige s'affaissa sous mes pas, et je
m'effondrai avec mon chargement pour glisser le long d'une pente
raide. Dans une avalanche de neige et de roche, je m'écrasai comme
une merde sur un sol de galets, au bord de la rivière. J'avais dû
me blesser dans la chute parce que je n'arrivais plus à bouger.
J'étais encore conscient et je tentai d'appeler à l'aide, en vain.
Il n'y avait pas âme qui vive à des kilomètres. Mon agonie dura de
longues heures. Heureusement (ou pas ?), je ne vis pas ma fin
car je sortis alors doucement de ma méditation.
Je restai un moment à
reprendre mes esprits, perplexe. L'expérience était différente de
ce à quoi je m'attendais. J'avais l'impression de ne pas être
vraiment « parti », d'être toujours resté conscient du
présent en même temps que je voyais le passé. Et pourtant ça
avait été très intense. Avant de commencer je m'imaginais que
j'allais voir des choses hors du commun, des images défiler devant
mes yeux comme par magie. Et ce n'est rien de tout ça ! C'est
beaucoup plus simple, ce qu'on voit ressemble complètement à un
souvenir comme un autre. C'est peut-être pour ça que la plupart des
gens s'imaginent ne pas pouvoir faire ce type d'expérience. Ils
croient que ce sont des sensations extraordinaires, alors qu'il faut
juste se mettre à l'écoute de son moi profond. Pas besoin d'être
medium, ni d'avoir de don particulier pour ça, c'est accessible à
tous. Pour expliquer ce que j'ai vu, la meilleure comparaison serait
celle d'un rêve. Ca ressemblait à un rêve éveillé. Un rêve peut
être évanescent comme il peut être intense et très vivant. La
régression dans une vie antérieure, c'est pareil.
Sur le coup j'étais
surpris. Je n'avais pas espéré voir tant de choses du premier coup,
et je me demandais si c'était bien réel, si j'avais vraiment revu
une de mes vies passées. Un nom me vint à l'esprit pour ce
trappeur : « Joe ». Je ne sais pas si c'était
vraiment son nom, mais ça lui allait bien. L'expérience était de
toute évidence un succès, et malgré tout je n'étais pas
complètement satisfait. J'avais encore des doutes. Cet homme des
bois avait-il réellement existé ? Ou était-il juste sorti de
mon imagination ? Il fallait que je vérifie. Les informations
précises que j'avais c'est qu'il vivait au Québec à l'embouchure
du St Laurent. A quelle époque ? L'homme était blanc et
maniait la carabine, carabine pour laquelle j'avais nettement perçu
un nom : Winchester 30/30. Ce détail me laissait sur le cul. Je
n'avais aucune connaissance des armes à feu. J'aurais peut-être pu
entendre ce nom dans un western ? C'était possible, et mon
cerveau aurait enregistré l'information. Mais l'indice restait
valable quand même. Je fis des recherches, et je découvris que la
30/30 Winchester est le calibre d'une munition apparue à la fin du
19e siècle. Et la première carabine compatible avec ces munitions
est la Winchester modèle 94, créée comme son nom l'indique en
1894. Ce que j'avais vu de Joe le trappeur ne pouvait donc se situer
qu'après cette date.
L'autre indice intéressant
était le nom que j'avais entendu « ...amis », qui
pouvait correspondre à un lieu de l'époque. Je suis allé faire des
recherches dans une grande librairie parisienne, la F...C pour ne pas
la citer. Je passais des heures à consulter un tas de livres, je
n'avais pas internet en ce temps-là (ça ne me rajeunit pas!). Et
j'ai trouvé une bourgade sur la rive nord du St Laurent dont le nom
est Betsiamites. Une autre petite ville du secteur s'appelle
Rivière-du-Loup. Ca ne prouvait rien bien sûr, mais quelles
coïncidences ! Aujourd'hui en écrivant cet article, j'ai enfin
internet (!) et je peux compléter mes recherches en gagnant un temps
fou. Il
s'avère que Betsiamites est une réserve autochtone à l'embouchure
de la rivière du même nom. En
2009 Betsiamistes a changé de nom pour Pessamit, et l'ancien nom de
la rivière est Bersimis. Les autochtones qui habitent ces lieux sont
les innus ou montagnais. Tous ces noms me parlent étrangement, c'est
dingue ! Joe n'était pas autochtone, c'est-à-dire indien
d'origine, j'en suis presque sûr. Mais il était sûrement en
contact avec eux. D'ailleurs j'ai trouvé quelques phrases de la
langue innu sur le net et j'ai trouvé que ça m'évoquait quelque
chose. Le trappeur avait très bien pu maîtriser cette langue pour
communiquer avec ses voisins.
A l'inverse, le nom de Rivière-du-Loup est une drôle de coïncidence
mais ça ne me parle pas plus que ça. Sûrement une fausse piste.
Aujourd'hui je commence à me familiariser avec ces sensations de
déjà-vu, et j'arrive plus ou moins à les reconnaître. J'ai donc
retrouvé l'époque et sans doute le lieu de vie du trappeur. Mais le
nom «...amis » a sûrement aussi une autre signification. J'y
reviendrai dans un prochain article car c'est lié à une autre vie.
En tout cas, cette vie de trappeur semblait plausible. Ces premières
visions me donnèrent envie de continuer l'exploration de mes vies
antérieures. C'est ce que j'ai fait et s'en sont suivies beaucoup
d'autres découvertes étonnantes. Je les raconterai dans les
prochains articles. Je vais d'abord m'attarder sur Joe, car dans
d'autres régressions j'ai revu d'autres souvenirs concernant cette
vie. J'ai vu notamment des images de son enfance dans une famille
nombreuse plutôt pauvre. Ils vivaient dans une chaumière, on se
serait cru dans du Zola. Puis j'ai vu des personnes qu'il avait
côtoyées dans sa vie d'adulte, notamment un gars qui a partagé sa
cabane de chasse. C'était un homme grand et barbu, brun, peut-être
un frère ou en tout cas quelqu'un de proche. Il y avait aussi un
vieux chercheur d'or qui creusait seul dans les parois rocheuses des
alentours, un homme aux cheveux gris courts et aux petites lunettes
rondes. Nous avions des relations amicales de voisinage.
Ces deux personnes sont sûrement des gens que j'ai retrouvé dans ma vie
d'aujourd'hui, mon petit frère disparu pour le premier, et un ami
très proche pour le second. Il arrive souvent qu'on retrouve des
personnes proches de vie en vie, et j'y ferai souvent référence.
Mais j'y reviendrai plus tard, ce sera aussi le sujet d'un prochain
article.
Mais avant d'aller plus loin, je voudrais expliquer un peu le principe de
réincarnation. Il y a beaucoup de fausses idées là-dessus. L'idée
de réincarnation, ou métempsycose, ou transmigration des âmes, a
de multiples facettes, notamment dans l'hindouisme et le bouddhisme.
Mais quelles que soient ses variantes, cette philosophie va
apparemment à l'encontre des fondements de notre culture
occidentale. C'est complètement faux ! En fait la croyance en
la réincarnation a disparu en occident avec l'expansion du
christianisme. Mais auparavant les celtes y croyaient déjà, et même
Platon parlait de réincarnation. C'était une idée assez répandue
avant l'ère chrétienne. Ma vision de la réincarnation est celle de
Patrick Drouot, qui est en gros celle qui se répand sans bruit dans
notre civilisation depuis le 19e siècle. Je m'explique. Joe le
trappeur a vécu bien avant ma naissance, alors comment je peux
affirmer que nous sommes une seule et même personne ?
Physiquement il ne me ressemblait pas, et d'un point de vue purement
organique nous étions bien deux corps différents. Ce qui nous lie
alors va au-delà du corps physique. C'est ce qu'on peut appeler la
conscience ou l'âme, qui est le siège de la personnalité, du moi
profond, des souvenirs, en bref tout ce qui constitue un être
conscient à part entière. Le corps physique, lui, n'est qu'une
sorte de véhicule pour se mouvoir dans le monde matériel. Il est
périssable, alors que la conscience est immortelle. Cette âme
s'incarne à la naissance dans un corps humain puis elle le quitte à
sa mort. Jusque-là on retrouve le concept d'âme commun à de
nombreuses religions. Sauf que pour se réincarner, l'âme ne va pas
se rendre dans un quelconque paradis pour l'éternité. Elle retourne
bien dans une sorte d'au-delà, mais après un temps plus ou moins
long, quelques mois ou années, elle va choisir un nouveau corps pour
vivre une nouvelle vie. Elle s'incarne alors dans un fœtus ou un
nouveau-né et rebelote. Voilà, la réincarnation est un cycle de
naissance-vie-mort-renaissance et ainsi de suite. Bon, tout ça est
expliqué très simplement de façon schématique, je suis d'accord.
On n'explique pas tous les mystères de l'âme en quelques lignes, ce
serait un peu facile. Je vais approfondir les choses dans les
prochains articles, et aborder des points précis du principe de
réincarnation en m'appuyant sur des exemples concrets, mes propres
souvenirs de vies passées récoltés au cours de dizaines de
régressions.
Après ce que je venais de retrouver de ma vie de trappeur au Québec,
j'étais à peu près certain qu'il y avait là une vérité, et
qu'il fallait pousser mes explorations plus loin. Je voulais en
découvrir plus sur mon passé lointain.
Magnifique retranscription. Tu écris très bien c est un plaisir de te lire.
RépondreSupprimerLa visualisation paraît simple et claire avec toi, ce qui n est pas le cas pour moi. Je suppose qu' il faut un peu de temps. Ma pratique est encore ressente.
Lorsque tu dit j entends pour la carabine ou un lieu. On te parle dans ta tête lu je sais tout simplement?
Lorsque je dis j'entends ça peut être un peu les deux. A la fois les mots apparaissent dans mon esprit comme un souvenir sonore, et parfois ça peut être une idée qui surgit et qui s'impose à moi comme si je l'avais toujours su.
Supprimerd'accord, je comprends. Personnellement , je n'entends rien. Par contre j'ai ces certitudes qui s'imposent à moi et qui me font des fourmis dans la nuque lorsque je suis dans la bonne direction.
Supprimerje dois avoir un radar incorporé :)